Article écrit pour la revue littéraire « Le Traversier », sur le thème du « trompe-l’oeil »
C’était écrit. Inévitable. Inéluctable. Telle une fatalité. Jamais facile de trouver le bon moment pour une rupture, jamais facile d’attendre l’instant pour graver le point final. Peut-être à l’arrivée de cette dernière balade au cœur d’une journée d’hiver. Sur ce chemin boueux, les dernières traces de notre histoire. Le vent, la pluie, peut-être même la neige les effaceront. Seuls quelques souvenirs resteront. Les plus beaux. Forcément.

Nous nous étions rencontrés il y a un peu plus d’un an. Des mois que nous ne nous quittions pratiquement plus. Toujours de mèche, toujours dans les pas l’un de l’autre. Nous avons d’abord appris à nous connaître. Ça a parfois un peu chauffé entre nous. Le temps de s’habituer l’un à l’autre. Et puis très vite, nous avons trouvé nos marques. Jamais lassés de nous enlacer. J’avais trouvé… « chaussure à mon pied ». Une pointure. Depuis, toujours fidèle, elle m’a accompagné. À toutes allures. Parfois lentement, au pas, pour prendre le temps de profiter de chaque seconde, parfois au sprint dans d’effrénées cavalcades pour s’enivrer de vitesse et partir à la quête d’inaccessibles records. Toujours, elle m’a soutenu.
Depuis quelques semaines, les choses avaient changé. L’usure avait commencé son œuvre destructrice. Nous étions sortis de notre confort. J’ai d’abord essayé de faire semblant, essayé de me convaincre que tout allait bien en espérant étirer encore un peu notre histoire. Je voulais y croire. Douce mais vaine illusion. Bien sûr, j’aurais pu encore prolonger un peu cette aventure. Bien sûr, je regrette de ne pas avoir pris suffisamment soin d’elle. Nous aurions pu faire encore un peu de chemin. Ensemble. Peut-être aurions-nous gagné quelques semaines. Peut-être même quelques mois. Mais à quoi bon ? Je savais au plus profond de moi que nous arrivions au bout de notre route.
Alors voilà c’est fini. C’est la vie. » Il faut tourner la page… Changer de paysage, Le pied sur une berge, Vierge », chantait Nougaro.
Toutes les belles histoires ont une fin, paraît-il. Alors, le temps est venu de se dire adieu. Peut-être nous retrouverons-nous un jour pour une petite marche. Sans lendemain. Comme avant. Ou presque. L’insouciance de nos premiers pas ne reviendra pas. Je le sais.
Aujourd’hui, tous les sentiments se mêlent. Une nouvelle histoire a commencé. Dès que je l’ai aperçue, encore dans sa petite « boite » telle une chrysalide sur le point de déployer ses ailes de papillon, elle m’a séduit. Telle une évidence. Plus jeune, pleine de vitalité. Le temps n’a pas encore laissé ses empreintes. Ensemble, nous partirons découvrir de nouvelles routes, de nouveaux chemins, de nouveaux espaces. Ensemble, nous laisserons de nouvelles traces. Ensemble, nous partagerons de belles aventures. Intenses. Forcément.
Voilà… j’ai une nouvelle paire de chaussures.